Depuis 2018, la détermination du mouvement climatique se renforce chaque jour partout dans le monde. Des dizaines de milliers de citoyens se réunissent, marchent, signent des pétitions, s’expriment dans les médias et organisent des actions fortes pour que soit menée une politique climatique ambitieuse. Une politique climatique qui soit à la hauteur de la gravité des constats posés par la communauté scientifique internationale depuis plus de 30 ans. Des dizaines de milliers de citoyens, familles, élèves de primaire et de secondaire, étudiants du supérieur et du professionnel, enseignants, scientifiques, académiques, employés du secteur associatif, agriculteurs, entrepreneurs, etc. exigent que cesse immédiatement l’inertie collective, politique et citoyenne. Aujourd’hui, des dizaines de milliers de fonctionnaires et d’employés du secteur public souhaitent se joindre à ce mouvement climatique.

Parce qu’ils sont au carrefour des connaissances scientifiques, des injonctions politiques, des demandes citoyennes, associatives et entrepreneuriales, et exécuteurs des politiques publiques ; parce qu’ils demeurent à leur poste et assurent la continuité du service public alors que les majorités politiques alternatives se succèdent au pouvoir ; parce qu’ils sont la courroie de transmission indispensable de la démocratie belge et européenne, les fonctionnaires et employés du secteur public sont idéalement placés pour mesurer chaque jour l’écart gigantesque entre la gravité de la situation environnementale et l’inertie causée par les politiques menées.

Parce qu’ils comptent en leurs rangs de nombreux scientifiques, techniciens, spécialistes de l’action publique et experts du climat, les fonctionnaires et employés du secteur public souhaitent rappeler le fait qu’on ne négocie pas avec le climat et qu’il ne s’agit pas d’un enjeu partisan. Le climat n’est pas régulé par les bonnes intentions, les espoirs et les vœux pieux mais par la physique des émissions de gaz à effet de serre. Cette physique est implacable et exige de notre société une stricte maîtrise de ses émissions en fonction des limites scientifiques de la technologie. D’après le GIEC, seule une politique ambitieuse de transition massive peut désormais nous permettre de faire plafonner les émissions en 2020 et de décarboner l’économie d’ici à 2050. Les fonctionnaires belges de l’environnement en particulier, dont la mission légale est d’informer le grand public de l’état de l’environnement, veulent souligner auprès des citoyens, à la lumière des plus récents travaux scientifiques, que si nous continuons à transgresser collectivement les limites du fonctionnement de la biosphère et du climat, il sera de plus en plus difficile de garantir la continuité des services publics et la préservation de la santé, de l’environnement et des biens publics.

Ainsi, parce que c’est l’existence même de la communauté des citoyens, de l’Etat et des institutions, la continuité même du service public, la garantie même de la démocratie qui sont toutes à la fois menacées par l’inertie actuelle face au réchauffement climatique, les fonctionnaires ne peuvent empêcher leur conscience de leur rappeler le sens de leur mission et de leur fonction, et leur rôle fondamental dans le maintien des institutions.

Parce que leur mission est de préserver la santé humaine, animale et environnementale, la continuité du service public, l’intérêt général, l’égalité, la solidarité, la justice, la stabilité de l’économie et des communications, le patrimoine public, la formation des générations futures, la conception, la construction et l’entretien des infrastructures, l’approvisionnement en eau et en énergie, la Sûreté de l’Etat, la sécurité nucléaire et le respect des lois et accords internationaux, et parce que le dérèglement climatique menace gravement cette mission, les employés du service public ne peuvent qu’exprimer publiquement leur extrême préoccupation.

Parce que le logement, l’alimentation, l’agriculture, la mobilité, le transport, l’économie, l’industrie, le commerce extérieur, l’aménagement du territoire, les forêts, l’infrastructure, la fiscalité, les finances sont parmi les compétences qui influencent les principaux secteurs émetteurs de gaz à effet de serre, les employés du public ne peuvent que s’engager à œuvrer à la transition sociétale dans ces domaines.

Parce qu’ils ne peuvent se retrancher derrière leurs devoirs de loyauté, de neutralité et de réserve, parce qu’ils jouissent de la liberté d’expression garantie par la Constitution, parce qu’ils sont tous des citoyens, parce qu’ils veulent protéger les générations présentes et futures, les fonctionnaires et employés du public ne peuvent se taire et laisser seuls les jeunes dans la rue sans rien faire. Car si les jeunes se demandent à quoi bon aller à l’école s’il n’y pas de futur ?, de plus en plus de fonctionnaires se demandent également à quoi bon faire fonctionner l’Etat et les services publics s’il n’y a pas de futur ?

Parce que l’enjeu climatique transcende désormais toutes les politiques, tous les partis, et tous les corps intermédiaires, qui sont la colonne vertébrale de la démocratie. Nous, fonctionnaires et employés du secteur public, appelons tous les fonctionnaires de Belgique et d’Europe, agents des communes, des provinces, des régions, des communautés, de l’Etat fédéral, de l’Union européenne, les enseignants de l’enseignement obligatoire et du supérieur et employés du secteur public, à utiliser leur droit constitutionnel à la liberté d’expression, et à prendre conscience du sens de leur mission, en rejoignant le mouvement pour le climat.

Parce que seule compte désormais l’action, nous appelons concrètement les fonctionnaires et employés du secteur public qui le souhaitent à l’une ou plusieurs des actions suivantes :

1) continuer à œuvrer, en tant que citoyens et fonctionnaires, à la défense de l’intérêt général, à la continuité des services publics et à la préservation des biens publics, conformément à la législation belge, aux directives européennes et aux traités internationaux ayant trait au climat ;

2) œuvrer dans leur fonction pour que l’Etat belge et l’Union européenne se mettent en capacité institutionnelle et démocratique de répondre à l’urgence environnementale, notamment en adoptant une loi spéciale climat, un Plan national Climat-Energie, et un programme d’action européen à la hauteur de l’urgence relayée par les scientifiques ;

3) se joindre à la grève mondiale pour le climat du vendredi 15 mars 2019 et à la marche à Bruxelles le même jour ;

4) se joindre à l’initiative #CivilServants4Climate et organiser spontanément et de façon autonome, partout où ils se trouvent, chaque jeudi, des pauses-midis pour le climat, devant leurs bâtiments ou dans des lieux publics centraux, afin de débattre avec les citoyens qui le souhaitent des enjeux du dérèglement climatique, dans toutes leurs dimensions : énergie, mobilité, alimentation, logement, santé, sécurité, financement, fiscalité, gouvernance, etc. ;

5) signer la pétition citoyenne appelant à reconnaître publiquement l'urgence environnementale et rejoindre ses porteurs.